Les labours préparatoires d 'Algérie en 1876

Le Dry Farming , il s'agit de pratiques culturales anciennes et en Algérie, on parle des " labours préparatoires " ou simplement des " préparés ".

C 'est un assolement biennal qui remplace la jachère inculte par une jachère travaillée, le but étant d'ameublir le sol pour faciliter l'infiltration de l'eau et de détruire la végétation afin d'éviter les pertes par évaporation: d'une récolte à l'autre, la terre devrait bénéficier de deux années de pluviosité. Au début, le travail de la jachère comportait seulement un labour de printemps, ensuite, précédé d'un labour d'hiver et complété d'un labour d'été.

Marès, professeur départemental d'agriculture en Algérie, dit à propos de la méthode des labours de printemps, qu'il avait eu l'occasion de l'observer dans les régions tunisiennes.

Dans une proclamation en date du 20 juin 1845, Bugeaud s'adressant aux Arabes et aux Kabyles, dit notamment : ( Donnez un ou deux labours préparatoires aux terres que vous voulez ensemencer la même année, le premier en février ou en mars, le second en mai... Avec des terres ainsi préparées, vous pourrez semer aux premières pluies d'octobre et vos blés n'auront plus à craindre les sécheresses de mai ).

Le principe de la jachère travaillée était, en effet, connu en Algérie, avant l'arrivée des Européens. Les Romains furent probablement les initiateurs des Africains en matière de culture en terre sèche. Les Colons s'inspirèrent sans doutes des pratiques indigènes, mais lancèrent la méthode avec son application rationnelle et perfectionnée.

Le comice agricole de Sidi-Bel-Abbès aurait codifié la méthode des préparés et les colons de Sidi-Bel-Abbès l'auraient généralisée.

La pratique des labours préparatoires fut signalée : dans la région de Sidi-Bel-Abbès après 1880, les Hautes Plaines de Sétif vers 1890, la région de Vialar les connaîtra un peu plus tard. Et le Chélif s'inscrit en bonne place, peut-être à la première : il est certain que la nouvelle méthode culturale était pratiquée à Affreville en 1895 ou 1896, à Inkermann en 1893, à Carnot à partir de 1890, et Pourcher, gérant de la Société Générale Algérienne, affirme de façon formelle avoir été documenté dès 1876 sur la pratique des labours préparatoires par deux Colons d'Oued-Fodda ( Léger et Friburger ) qui en étaient des adeptes.

Elle ne se répandit pas facilement et sans difficultés. Dans le Chélif, elle était celle d'une élite de Colons, beaucoup se contentaient d'un labour de 8 à 10 centimètres pratiqué rapidement et négligeaient complètement les labours d'été. En 1899, pour répandre la nouvelle méthode culturale, Marès établissait un champ de démonstration à Charon sur une parcelle de 12 hectares.

Les conséquences de l'économie du Chélif, en furent profondes, Vagnon, colon à Kherba, écrivait : " avec les préparés, il est indispensable de mettre à la portée du colon le double de la terre qui lui est nécessaire pour assurer son exploitation annuelle c'est-à-dire qu'il faut au cultivateur 50 hectares de terre en production et, pour avoir 50 hectares de terre en production, il lui en faut 100, sinon pas de salut .

Avec les préparés, les rendements s'améliorèrent passant, pour les blés, de 4-8 quintaux à l'hectare à 10-12. Mais ce sont des moyennes et les rendements obtenus sur préparatoire sont peu supérieurs aux autres en année très bonne, ils sont réellement meilleurs en année moyenne et à peine meilleurs en mauvaise année. Or sur dix années on en compte une bonne, cinq moyennes et quatre mauvaises...L'assolement avec préparatoire n'est donc pas suffisant puisqu'il ne donne rien en années sèches.


Extrait de : La colonisation de la plaine du Chélif , de Xavier Yacono


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